mercredi 14 novembre 2012

Réseaux centrés et milieux extrêmes : de TCP/IP au DTN (Disruption Tolerant Networks)

La NASA vient d'annoncer le succès d'une expérience réalisée durant le mois d'octobre et intéressante à plus d'un titre. Sunita Williams, commandant de la 33ème mission à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS) a pu prendre le contrôle depuis celle-ci d'un robot en Lego au centre européen d'opérations spatiales (ESA ESOC) de Darmstadt en Allemagne. Si la prouesse n'a rien d'exceptionnel il s'agit cependant d'un test grandeur nature utilisant un nouveau protocole de tolérance aux interruptions réseaux autrement appelé Delay/Disruption Tolerant Networks (DTN).


Des zones terrestres les plus inaccessibles aux profondeurs océaniques jusqu'aux (futures) missions lunaires et martiennes, ce protocole devrait apporter une véritable amélioration dans les transferts de données et d'informations dans les milieux extrêmes et sur des distances où l'unité est le million de kilomètres ! Qu'on en juge : à la vitesse de la lumière, il faut 1,7 secondes pour faire communiquer la Terre à la lune. Pour Mars, c'est un minimum de 8 minutes qui sont nécessaires, lorsque la planète rouge est au plus près de la planète bleue. Les délais de latence pour tout échange interplanétaire sont donc très importants, le phénomène de radiations solaires intervenant en sus et de manière défavorable.

L'intérêt du DTN parait donc évident puisqu'au-delà des milieux extrêmes, de nombreuses applications sont possibles avec le bénéfice de la délivrance fiable de messages dans un réseau en mode partiellement déconnecté. L'internet, par contraste, est un réseau connecté où un protocole comme TCP/IP est presque exclusivement dépendant de taux de latences extrêmement faibles (quelques millisecondes). Cette latence très faible couplée à un BER (Bit Error Rates - le taux d'erreur) acceptable mais également très bas permettent à TCP/IP de transmettre et de recevoir les accusés de réception des paquets de données de manière extrêmement fiable. A l'inverse, les liaisons où le BER possède un taux élevé concernent la connectivité intermittente des communications...spatiales !

D'où l'idée de ce protocole à "tolérance d'interruptions" germé au CERN dans les années 90, dans l'esprit de l'un des pères de l'internet moderne, Vint Cerf, repris par la DARPA (l'agence de recherche des forces armées américaines) en 2005 en vue d'applications par la NASA. Un protocole de transport de données, tolérant à des taux d'erreur très élevés et à de longues déconnections concerne naturellement les réseaux centrés des forces armées et de sécurité mais aussi les infrastructures critiques civiles (en termes de résilience). Enfin, et par extension, le DTN est un nouveau champ d'application qui devra trouver sa place et être exploré en matière de cybersécurité et de sécurité de l'information.

Note : belle coïncidence, je souligne l'article complet de l'allié Cidris sur le site de l'Alliance géostratégique.

Sources :
État de l'art :
Taxonomie et conception :

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